Le cellulaire, signe d’intensité et de mouvance
Mars 2004
Chaire UNESCO-Bell, Univesité du Québec à Montréal, Canada
Par Sophie Poudrier
Sous la direction de Magda Fusaro, titulaire de la Chaire UNESCO-Bell en communication et développement international
Résumé
Contexte
Trois idées centrales ont guidé l’élaboration de cette recherche :
- L’usage que font les jeunes de leur téléphone sans fil leur est spécifique, donc est différent de celui des adultes;
- L’utilisation du sans fil par les jeunes détermine leurs comportements sociaux;
- L’introduction du téléphone sans fil auprès des jeunes permet l’élaboration d’un « mode de vie mobile ».
But de la recherche
Cette analyse vise essentiellement la clientèle des usagers grand public mobile puisqu’il s’agit d’identifier, chez les jeunes, l’émergence de comportements nouveaux consécutifs au développement et à la démocratisation du téléphone cellulaire.
Problématique
« L’an dernier (2003), 440 000 abonnés au cellulaire ont fait débrancher la ligne téléphonique à leur domicile. » (Johanne Lemay, présidente de la compagnie de consultants internationaux et télécommunications Lemay-Yates et Associés) Les habitudes des jeunes d’aujourd’hui sont annonciatrices de ce que sera le futur : quel sera celui réservé au téléphone fixe? Selon les spécificités du téléphone mobile et du téléphone fixe, qu’est-ce qui conditionne leur choix respectif? Le type de relation qu’entretient l’utilisateur avec son téléphone varie-t-il en fonction de ce choix? Quelles raisons expliquent le virage « mobile » ? Enfin, peut-on prétendre que les jeunes ont un « mode de vie mobile » ?
Résumé
Les différences techniques, telles que l’ergonomie, la personnalisation, la santé et le coût ressortent comme des notions influençant le choix du type de téléphone. La sécurité est, dans la plupart des cas, le prétexte de l’achat, que ce soit pour communiquer à partir de lieux isolés ou pour surveiller son enfant ou son conjoint. C’est l’influence des proches qui semble le plus convaincre les jeunes. La possibilité d’être rejoint hors du domicile leur donne plus de mouvance ainsi que la possibilité de ne rien manquer, comme une offre d’emploi ou une sortie. En fait, le sans-fil peut les aider à planifier leurs loisirs ou en être lui-même un objet, en occupant leur temps d’attente et les imprévus qui sont considérés comme du temps perdu.
Le téléphone mobile demeure en tout temps un objet très personnel et certains sujets sont à éviter en public (parler à ces parents en public peut représenter une situation gênante). La discrétion des appels est toujours de mise et quelques méthodes sont utilisées pour contrôler la médiation de la vie privée des utilisateurs, par exemples : le mode vibration du mobile et les SMS (Short Message Service). Après la netiquette, peut-on parler de « cellétiquette » ? En fait, les usagers intègrent si bien le cellulaire à leur mode de vie qu’il y prend place au même titre que leurs vêtements. Cela occasionne certainement une forme de dépendance et conséquemment une source de frustrations, surtout liées aux pannes de piles ou à l’impossibilité de rejoindre une personne. On assiste à la marginalisation des « sans-mobile », au renforcement des amitiés, aux transformations des relations inter-conjoint et des relations parents-enfants.
Les messages « mobiles », tout aussi banals que ceux du téléphone fixe, s’intègrent au quotidien en le rendant plus efficaces. Contrairement à la petite note laissée sur le réfrigérateur ou les messages laissés sur le téléphone fixes, la prise des messages reçus par mobile coûte habituellement cher aux usagés. Les jeunes doivent donc faire des choix sur les forfaits et même sur personnes à qui répondre. Ils choisiront leur canal de communication en fonction de la brièveté et du coût du message.
Trois profils caractérisent les utilisateurs de téléphone sans-fil, soient les compulsifs, les étapistes et les sans-attaches. Il existe plusieurs notions communes à ces profils, par exemples : personne ne veut manquer un appel, la question monétaire, et ils sont tous développé un sentiment de solidarité avec les autres utilisateurs de sans-fil.
Méthodologie
Douze participants ont été sélectionnés selon les critères établis lors de la première phase de recherche, plus précisément quatre personnes de chaque type de comportement « mobile », soit le compulsif, l’étapiste et le sans-attache. Comme aucun jeune ne semblait correspondre parfaitement à un type précis, les profils correspondent à l’amalgame des comportements de plusieurs personnes correspondant à une même attitude.